Le journal Echos du Travailleur a mené depuis le début de l’année 2017 une enquête sur les vrais chiffres de l’emploi au Cameroun. Au bout de ce travail,le journal décroché cet interview.
Interview type publié
La problématique de l’emploi des jeunes après la conférence annuelle des organes centraux et décentralisés du ministère de l’emploi et de la formation professionnelle en février 2017 reste d’actualité jusqu’à nos jours. Au cours de cette conférence, le ministre Zacharie Perevet avait annoncé une actualisation de la politique de l’emploi au Cameroun avec des zones d’ombres sur l’évaluation et les raisons. Echos du travail s’est intéressé à ce sujet depuis l’annonce et le ministre répond dans ses colonnes.
« Le marché de l’emploi reste caractérisé par un faible taux de chômage (3,8%) au sens strict du terme, alors que le taux de chômage élargi se situe à environ 5,6%. »
Monsieur le ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle, tout en vous souhaitant nos vœux les meilleurs pour 2017, quelles sont les réalisations les plus fortes de votre département ministériel dont vous êtes fier pour l’année 2016 ?
Zacharie Perevet, Ministre de l’emploi et la formation professionnelle(MINEFOP) : Je vous remercie non seulement de l’opportunité que vous m’offrez de présenter à vos lecteurs les réalisations de mon département ministériel durant l’exercice budgétaire 2016, mais aussi pour vos vœux. Je souhaite également à tout le personnel de votre journal, une bonne et heureuse année 2017.
Pour revenir à votre question, s’il est une réalisation pour laquelle j’éprouve une fierté légitime pour l’année 2016, c’est bel et bien l’inauguration par le Premier Ministre Chef du Gouvernement, les 15, 16 et 17 décembre 2016, des Centres de Formation Professionnelle d’Excellence de Douala, Limbé et Sangmélima. Permettez-moi de rappeler que ces Centres dotés d’équipements de pointe ont été construits dans le cadre de la coopération entre le Cameroun et la République de Corée. Ils nous permettront de mettre en pratique l’apprentissage dual (à savoir la formation théorique dans un centre et la formation pratique dans un atelier ou une entreprise), dont le Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle a opté pour une formation professionnelle hautement qualifiante et donc les produits seront compétitifs sur le marché de l’emploi national et international. Car ayant reçu une formation intégrale sur la base de l’Apprentissage par Compétences. Autrement dit, les apprenants, à la fin de leur formation dans nos Centres de Formation Professionnelle d’Excellence auront des savoirs savants, mais aussi des savoirs faire et des savoirs être d’excellence, dont le but est de faciliter leur insertion professionnelle. L’inauguration de ces CFPE constitue donc à maints égards, un motif de fierté légitime et d’espoir en l’avenir d’une formation professionnelle de qualité dans notre pays.
Quelle est la température du milieu de l’emploi et de la formation professionnelle au Cameroun en 2016 ?
MINEFOP : Dans son traditionnel discours de fin d’année le 31 décembre 2016, le Chef de l’Etat, Son Excellence Paul BIYA, a fait état de cette température en annonçant la création de 320 000 emplois nouveaux par le secteur moderne de notre économie. Ces chiffres sont symptomatiques du dynamisme observé dans les créations d’emplois par notre économie. Ces chiffres sont également à saluer du fait du contexte macro-économique en 2016, caractérisé par la poursuite de la chute des cours des matières premières sur le marché mondial notamment les hydrocarbures. C’est dans ce contexte particulièrement peu reluisant que le comptage des emplois créés du 1er janvier au 31 octobre 2016 affiche un bilan de 318 398 emplois. A titre comparatif à la même période en 2015, le nombre recensé d’emplois était de 175 000, soit une augmentation absolue de 143 398 emplois correspondant à un taux de création d’emplois de 18%. Au 31 décembre 2016, le nombre d’emplois créés, effectivement recensé est de 400 390 contre 337 669 à la même période en 2015. Entre 2015 et 2016, on relève que le nombre d’emplois créés par le BIP a presque doublé. Cette embellie se rapproche de l’atteinte de l’objectif de la création de 400 000 emplois annoncé par le Premier Ministre, Chef du Gouvernement devant la représentation nationale.
Vous avez annoncé l’actualisation de la politique de l’emploi au Cameroun ; quel est le bilan ? Qu’est ce qui n’a pas marché dans la politique actuelle ?
MINEFOP : En ce qui concerne l’actualisation de la Politique Nationale de l’Emploi, permettez moi tout d’abord de relever que dans sa vision de faire du Cameroun un pays émergent à l’horizon 2035, le Gouvernement met en œuvre depuis 2010 le Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi. Le DSCE vise sur la période 2010-2020 à porter la croissance économique du pays à 5,5% en moyenne annuelle ; ramener le sous-emploi de 75,8% à moins de 50% en 2020 avec la création de dizaines de milliers d’emplois formels par an ; et ramener le taux de pauvreté monétaire de 39,9% en 2007 à 28,7% en 2020. Après huit (08) années de mise en œuvre de cette stratégie, le volet emploi reste le ventre mou du DSCE. En effet, le problème de l’emploi et en particulier de celui des jeunes reste très préoccupant si ce n’est entier. Le marché de l’emploi reste caractérisé par un faible taux de chômage (3,8%) au sens strict du terme, alors que le taux de chômage élargi se situe à environ 5,6%. Ce niveau de chômage masque cependant un sous-emploi, qui reflète mieux le contexte camerounais. D’où l’impérieuse nécessité d’actualiser la Politique Nationale de l’Emploi. Cette actualisation suppose quatre préalables. Tout d’abord, que soit faite une évaluation de la Politique Nationale de l’Emploi en cours ; ensuite, que soient déterminés les nouveaux axes stratégiques de la nouvelle politique et élaborées une stratégie de mise en œuvre de ladite politique, et qu’enfin que soit proposé un nouveau cadre organisationnel de son suivi-évaluation.
Quels sont les moyens techniques utilisés par le ministère pour récolter les chiffres de l’emploi par année ? Quelles relations y a-t-il entre votre ministère, l’ONEFOP et l’INS ?
MINEFOP : Votre question est importante et me donne l’occasion de rappeler qu’un emploi créé est un poste de travail identifié à durée déterminée ou indéterminée. L’ONEFOP, Observatoire National de l’Emploi et de la Formation Professionnelle est un organisme sous tutelle du MINEFOP. L’Institut National de la Statistique est le partenaire technique qui aide le MINEFOP à recenser les emplois. Au plan de la méthode et de l’architecture institutionnelle de collecte, l’Observatoire National de l’Emploi de la Formation Professionnelle (ONEFOP), les structures privées et publiques de placement de la main d’œuvre et l’ensemble des organismes spécialisés collectent semestriellement, depuis 2014 les données sur les emplois créés de sources administratives dans les secteurs publics et privés de l’économie moderne sur l’ensemble du territoire national suivant l’arrêté N°008/MINEFOP du 31 juillet 2014.
L’option du recensement exhaustif est retenue au contraire de l’échantillonnage qui fonde les estimations ou les projections. De manière opérationnelle, cette méthode repose sur l’utilisation des données de sources administratives et des enquêtes semestrielles auprès des entreprises et de l’administration conformément au calendrier arrêté par le MINEFOP depuis 2014. Les défauts observés dans l’utilisation des sources administratives sont peu à peu compensés par une meilleure connaissance des sources et par la mise en place d’un Système d’Informations Statistiques (SIS) au sein des ministères et autres institutions. C’est dans cette même logique que les réseaux régionaux de collecte d’information sur les emplois créés ont été mis en place entre 2013 et 2015 par les gouverneurs de régions.
Il est question d’exploiter les données de sources administratives sur l’emploi dans les documents suivants: la Déclaration Statistique et Fiscale (DSF), le fichier solde des personnels de l’Etat, les fichiers emplois des entreprises agréées ou sous tutelle des ministères et des administrations publiques. Nous nous servons également des fiches de déclaration sur la situation de la main d’œuvre, le fichier du Document d’Information sur le Personnel Employé (DIPE), de la Caisse Nationale et de la Prévoyance Sociale (CNPS), les Banques des données des programmes du FNE, de l’ASCPD et des projets gouvernementaux d’insertion professionnelle (PIAASI, PIAJA, PAJER-U, PIFMAS) ; mais aussi, les fiches des personnels des Collectivités Territoriales Décentralisées, la Banque de données des entreprises, du MINPMEESA et chambres consulaires (CAPEF, CCIMA), les fichiers emploi des administrations, publiques sous tutelle et privées agréées, du Ministère de l’Education de Base (MINEDUB), du Ministère des Enseignements Secondaires (MINESEC), du Ministère de l’Enseignement Supérieur (MINESUP), du Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle (MINEFOP) et enfin des rapports des organisations professionnelles d’employeurs, des organisations professionnelles de travailleurs et ordres professionnels.
Je ne saurai terminer mon propos sans remercier toutes les entreprises et les administrations qui ont aidé les jeunes à s’insérer dans les circuits de production en leur donnant un poste de travail. En agissant de la sorte, ces acteurs ont pris la mesure des enjeux de la croisade que le Gouvernement mène contre le chômage et la pauvreté en plaçant l’emploi au centre de leur préoccupation. Je ne doute pas que les autres vont leur emboîter le pas pour que la lutte contre le chômage soit effectivement une affaire de tous et de chacun, et donc, une cause nationale.
Interview paru dans le Journal ECHOS DU TRAVAILLEUR,édition spéciale du mois de mai 2017
Propos recueillis par Rigobert Kenmogne
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